L’autodafé de la page blanche
Autodafé : Après avoir traité mes manques d’inspiration avec angoisse, puis avec désinvolture, voici le temps de la colère.
Colère contre moi même, colère contre ce confinement déconfiné si timoré, si complexe que même les mots s’embrouillent. Sans doute aussi, colère contre ce virus qui est venu bousculer nos certitudes et nos projets. Colère contre nous, contre ce collectif humain capable du meilleur et si souvent du pire.
C’est facile la colère, c’est une explosion de n’importe quoi. On fait “sous le coup de la colère” et tout s’explique, même l’inexplicable. Ça fait du bien la colère, ça défoule, ça fait passer frustration et ennui. Ça fait du mal la colère lorsqu’elle se finit et que l’on se retourne.
Aujourd’hui je ne sais pas trop quoi dire. C’est l’aube qui pourtant m’inspire si souvent et mes pensées tournent dans le vide… Aujourd’hui je voudrais retourner dans une coquille, m’y blottir. Ce matin je me sens poussin ou escargot et ça m’énerve. On est ridicule sans doute avec deux petites cornes qui s’étendent ou se rétractent à volonté. Ce matin, je voudrais que le vent écrive pour moi, qu’il dise mon impuissance et mes doutes.
Le journée qui s’annonce est orageuse, comme mon humeur. Une journée de confiné qui regarde venir avec angoisse ce déconfinement tant espéré. Colère contre cette difficulté à appréhender ce qui vient et contre ce monde absurde que j’aime pourtant.
Il ne me reste qu’à rendre au néant ces pages blanches, ce manque d’inspiration.
Pas de cadavre, pas de crime, peut-être est ce que cela fonctionne aussi pour nos pensées ? Faire disparaître une absence est une gageure, mais le défi est amusant.
J’ai parlé d’autodafé. Juste pour brûler ce vide. C’est sans doute le premier qui n’ait d’autres visées que d’annihiler le rien.
L’autodafé du néant.